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Au fil de nos lectures et rencontres nous avons constaté que souvent les termes “éthologie” ou “éthologique” est utilisé par des éducateurs, des comportementalistes, des vétérinaires. On lit parfois que les clients reçoivent des conseils sur “l’éthologie du chien”. Et ces conseils portent souvent sur la notion de meute, de hiérarchie...
“Pour être en accord avec sa culture, l’homme parle d’éthologie canine mais ne pratique que du conditionnement à l'égard du chien. Pour laisser place aux fantasmes ainsi qu'au pouvoir de son propre monde, il exclut totalement le Sens du monde du chien.” André Escafre
... Mais l’éthologie c’est quoi ?
Partons d’une simple définition :
Le mot «éthologie» est issu des deux mots grecs « ethos » qui signifie « mœurs » et «logos», qui signifie «science». L’éthologie est donc étymologiquement la «science des mœurs». L’éthologie s'intéresse aux comportements des animaux, y compris ceux de l'homme, dans des conditions de vie données mais variables (milieu naturel, conditions domestiques, en captivité, lors de tests, etc). Elle porte sur les comportements en eux mêmes, ainsi que sur ses causes et ses fonctions. L'éthologie s'organise autour de 4 grandes questions, définies par Tinbergen en 1963 :
1 - Quelles sont les causes (immédiates) du comportement?
2 - Quelle est sa valeur de survie ?
3 - Comment s'est-il mis en place au cours de la vie de l'individu ?
4 - Comment s'est-il mis en place au cours de l'évolution de l'espèce?
L’éthologie est donc une science qui s’attache à observer les comportements des animaux, en aucun cas il ne s’agit de la description des comportements (vous saisissez la nuance ?). On ne peut donc pas parler “d’éthologie du chien” pour décrire, par exemple, le fonctionnement social du chien (en parlera éventuellement d’éthogramme : “Un éthogramme est une liste exhaustive des différents comportements émis par une espèce ou un individu. Il inclut également la description précise, formelle (physique) ou fonctionnelle, de chacun de ces comportements.” ) , ni de méthode éthologique. On peut tout au plus s’appuyer sur les résultats des travaux des éthologues pour mettre en oeuvre des méthodes ou techniques d’apprentissage, de rééducation ou simplement pour comprendre un comportement dans un contexte particulier. Car l’autre particularité des observations éthologiques est qu’elles sont toujours contextualisées.
Et le chien dans tout ça ?
Que nous dit l’éthologie sur les comportements sociaux des chiens (source de tant d’interprétations erronées)
Au départ (faux départ) des études (mal) menées sur des loups en captivité qui font émerger une “hiérarchie” inexistante à l’état sauvage du fait de l’organisation des distribution de nourriture, de la captivité et du regroupement d’individus issus d’origines différentes. Pensez-vous que les comportements observables en prison permettent d’expliquer tous les comportements humains ? On en revient ici à la nécessité de contextualiser les observations. Les meutes sauvages sont en fait des structures familiales plutôt paisibles et coopératives.
Le grand écart : De ces observations sur les loups (déjà biaisées) certains ont tiré des conclusions et développé des théories sur le comportement canin et notamment sur le fonctionnement social du chien. Les éthologues ne peuvent évidement pas valider une méthodologie aussi absurde que celle qui consiste à observer une espèce (le loup) pour tirer des conclusions sur une autre (le chien) même si il existe une parenté entre ces deux espèces. Il serait tout aussi incohérent d’observer des comportements des bonobos pour expliquer les comportements humains.
Le grand saut : Certains cynophiles ont alors réalisé l’impossible (et ils continuent, encore aujourd’hui, à diffuser leurs idées), à savoir prétendre qu’un supposé fonctionnement hiérarchique canin (s’appuyant sur d’anciennes observations de loups en captivité, je vous le rappelle) serait transposable à la relation que les chiens entretiennent avec les humains... Alors que le seul moyen de décrire et de caractériser ces interactions inter-spécifiques (entre deux espèces différentes) réside dans l’observation contextuelle de ces mêmes interactions et non à chercher à justifier des pré-supposés par des observations orientées et non contextualisées. Il est évident pour tout le monde que les chiens ne développent pas avec les chèvres des comportements sociaux comme il le font avec leurs congénères... pourquoi en serait il autrement vis à vis des humains ?
Et que disent les éthologues ?
- Sur les loups (en anglais) : https://youtu.be/tNtFgdwTsbU
- “La hiérarchie, selon Dominique Guillo, est le résultat mouvant et incessamment éprouvé de multiples face à face, d’ interactions permanentes entre individus.” La hiérarchie est un ensemble de règles permettant à des individus de vivre ensemble dans un espace partagé. Chez le chien, cette hiérarchie est fluctuante en fonction des situations vécues et des individus rencontrés, elle n’a pas un caractère permanent. C’est pourquoi, il est erroné de qualifier un chien de dominant parce qu’il hérisse le poil, qu’il montre les crocs à un de ses congénères, ou parce qu’il n’obéit pas à son maître!”
- “La famille humaine ne constitue pas une meute. Nous avons tendance à décrire les comportements sociaux du chien et son organisation sociale, comme ceux du loup. Or, il s’agit bien de 2 espèces distinctes, vivant dans des environnements très différents et subissant des pressions de sélection différentes. Rares sont les études décrivant l’organisation sociale chez le chien domestique vivant près de l’homme (chien de compagnie, d’utilité ou en collectivité canine).”
- “Expliquer la vie du chien dans nos familles par une relation de dominance-subordination, ne semble pas adapté à la réalité. Cette « théorie » n’est pas pertinente pour expliquer les comportements agressifs des chiens de compagnie. Un chien grognant envers un humain sur sa gamelle ou pour descendre du canapé n’est pas un chien qui est « mal hiérarchisé », mais plutôt le résultat d’un apprentissage.”
L’éthologie ne doit donc pas servir de faire-valoir mais permettre le développement de savoir-faire. Pour parler d’éthologie, encore faut-il lire les résultats des observations que nous délivre cette science, sans quoi nous continuerons à voir se perpétuer des conceptions rétrogrades et erronées.